L'écologie réaliste

Les déchets ménagers: réunion de travail à l'Elysée

Une réunion de travail sur la gestion des déchets s’est tenue à l’Elysée le 21 septembre, sur l’initiative de FRANCE-ECOLOGIE, avec Stéphane DUPRE la TOUR, Conseiller industrie, environnement et transports auprès du Président de la République. Cette réunion avait pour but de dresser un bilan des mesures et pratiques actuelles en matière de déchets ménagers, des défis à relever en matière de prévention et des nouvelles orientations/actualisations proposées par la directive cadre européenne.

Avec Isabelle JACONO, présidente de FRANCE-ECOLOGIE, et Dominique JULIEN LABRUYERE président délégué de FRANCE-ECOLOGIE,  étaient présents Philippe BODARD conseiller général, vice-président de la CA d’Angers, administrateur au Conseil National des Déchets, Bruno GENTY en charge du dossier à France Nature Environnement, Jean CAMBILLARD en charge du dossier à Que Choisir, Florence COURAUD directrice du CNIID, Frédéric JACQUEMARD de la FRAPNA, Bernard HERODIN directeur d’ECO EMBALLAGES, Jean-Marc VAN DE KERKHOVE directeur SITA Ile de France, et Claude CHAMPREDON directeur de recherche à l’INRA, délégué (déchets) FRANCE-ECOLOGIE.

Les principaux points évoqués ont été :

- Les volontés individuelles et collectives actrices dans la minimisation des déchets résiduels ménagers

L'exemple de la Belgique permet de comprendre combien les volontés individuelles et collectives peuvent être conjointement déterminantes pour favoriser la minimisation des déchets résiduels ménagers, même si ces actions ne coïncident pas toujours pour l'instant avec la logique de fabrication industrielle.

- Le citoyen au cœur de la problématique des déchets, transparence et démarche participative

Les participants ont évoqué à de nombreuses reprises l’exemple du succès de la réduction du nombre de sacs de caisse afin de bien démontrer que le citoyen était capable d’actions éco-citoyennes lorsqu’il y était incité. En effet, sous l’impulsion de la Loi d’Orientation Agricole 2006 visant à interdire les sacs de caisse non biodégradables sur le territoire français à partir du 1er janvier 2010, les distributeurs suppriment peu à peu ces sacs. Ainsi, si dans certains cas, quelques résistances de consommateurs existent, près de 90% approuvent ce dispositif,  près de 70% « jouant le jeu ».

- Leviers incitatifs et financiers, effets pervers, difficultés d’application : un financement à revoir

FNE a évoqué la nécessité de mettre en place des leviers financiers incitatifs, en apportant des modifications au dispositif prévu fin 2004 pour la redevance proportionnellement à la quantité réelle de déchets produits: tel serait l’objectif en France de cette redevance incitative qui a été mise en place dans une quinzaine de communes françaises avec des résultats probants.
Des études menées à l'étranger (Belgique, Allemagne ou Suisse) et en France montrent que la quantité d’ordures ménagères résiduelles baisse de 15 à 50 %, au profit des quantités de déchets recyclables.
Cependant, la redevance ne solutionne pas tout.
Le compteur de déchets (pesée embarquée, titrage) est un moyen intéressant de contrôler les quantités, mais ne peut se substituer à une véritable politique. La pesée peut s’avérer être un moyen contre-productif voire contre-pédagogique favorisant parfois des comportements « tricheurs », même si ces derniers demeurent très marginaux et on tendance à s’estomper dans la durée.
Autre effet pervers : le tri, toujours préférable à l’incinération ou l’enfouissement, ne doit pas pour autant favorise une augmentation permanente des tonnages de résidus triés, car le tri a un coût pour l’environnement et pour les finances publiques.
Il a été évoqué, par ailleurs, l’aspect particulier d’une telle mesure sur le plan politique et social. 
En effet, le passage de la taxe à la redevance incitative relèverait d’un courage politique fort de la part des élus: la redevance, rendant le prix de la gestion des déchets visible par l'usager, devra réclamer beaucoup d’explications de la part des collectivités qui devrant être claires envers leurs contribuables sur la réalité des coûts et leurs motivations.
C’est pourquoi, il serait opportun que l’Etat puisse assumer lui-même cette responsabilité par la loi comme cela a été fait en Irlande. Le conseiller de l’Elysée a rappelé que le futur projet de loi de finances pourrait permettre  de modifier le dispositif actuel en rendant la REOM plus attractive pour les élus locaux détenant la compétence.

- Agir en amont, au niveau de la production des déchets

Le débat a porté sur la « réduction à la source ». Si la redevance incitative consitue un outil intéressant pour responsabiliser le consommateur, il importe de responsabiliser également les producteurs. Il existe un besoin fondamental de législation et de réglementation au niveau de la production des déchets sur le principe du « pollueur- payeur», dans une logique de responsabilisation du producteur de déchets. 
Il a été rappelé que la directive européenne à venir fixait de nouveaux objectifs en matière de  prévention des déchets (obligation de plans de prévention dans le projet de directive Cadre présenté début 2006 par la Commission), de taux de recyclage.

Deux lois de finances 2006 devant être votées d’ici la fin de l’année, le conseiller de l’Elysée s’est dit prêt à recevoir des propositions qui pourraient être mises en œuvre au plus vite.

1ere proposition: dans la perspective d’une redevance incitative, pouvoir compléter les produits de la redevance par un recours à un budget annexe permettrait de dissocier l’ensemble des coûts. Le principe de la redevance prendrait en compte également les déchets triés mais en les facturant, à quantité égale, à un moindre coût.

2ème proposition: la notion d ’éco-conception – facteur important dans la réduction des déchets à la source – doit être valorisée et promue, comme le recommande l’ADEME. il sera donc nécessaire de lancer en septembre 2007 un grand débat national comme en 1975 et 1992, afin de responsabiliser, par la loi, les producteurs de déchets.

3ème proposition: un enjeu futur alarmant concerne la pénurie à venir des exutoires, due à l’obligation réglementaire pour les départements de traiter au niveau local en limitant les transferts de déchets. Le tri permet de laisser de moindres quantités à l’enfouissement. Pour autant, l’attention a été attirée sur le fait qu’il faut proposer des alternatives à l’incinération et à l’enfouissement, et convaincre collectivités et associations d’installer des centres de méthanisation et de compostage . Cependant le compost issu d’OM brutes n’étant souvent pas actuellement de qualité suffisante, il devra être fait en « mélange », ce processus ne dispensant pas de filière de traitement en aval. Dans cet objectif, doit être poursuivi le développement de la recherche et de l’innovation technologique.

4ème proposition: un consensus a été établi autour de deux objectifs complémentaires : 1) la nécessité d’étendre la compensation offerte aux collectivités qui accueillent des usines d’incinération, aux usines de méthanisation et aux centres de tri, avec des plafonds de taxation adaptés. Le CNIID, qui a soumis ce projet, doit faire parvenir une proposition détaillée au conseiller de l’Elysée en précisant l’article de loi à changer. 2) la mise en place en parallèle d’une subvention pour les communes qui limitent leurs déchets résiduels non recyclés, pour agir en amont.

Pour conclure, il a été rappelé qu’il existe des possibilités de poursuites pénales en matière d’environnement depuis août 2005 et qu’un Office central de répression placé auprès de la gendarmerie nationale a été créé en 2004. Le cadre réglementaire et pénal est donc tout à fait opérationnel mais il peut encore - bien sûr- être amélioré.

 

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